M e n u


Les mots d'Angot
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Est-ce que le gaz est bien fermé ? Est-ce que le facteur est passé ? Est-ce que la fenêtre est ouverte ? Est-ce que tu crois que Noria va nous rembourser ? Est-ce que tu crois que Léonore est bien équilibrée ? Habillée comme ça comment tu me trouves ? Et les chaussures ? Celles-là ou celles-là ? Est-ce que tu crois qu'on sera heureux ? Est-ce qu'on va s'en sortir, tu crois ? Et le téléphone ? Et le répondeur ? Et la lumière du salon qui marche une fois sur deux ? Et le robinet de la cuisine qui goutte. Depuis maintenant des semaines. Depuis maintenant deux mois. Depuis bientot cinq mois. Est-ce que tu crois que Léonore est bien équilibrée ? Est-ce que tu crois qu'on va s'en sortir ? Est-ce que tu crois qu'on vivra toujours à Montpellier ? Est-ce que tu crois qu'on mourra à Montpellier ? Est-ce qu'on déménagera ? Est-ce que Léonore nous quittera ? A quel âge ? Qu'est ce ça nous fera ? Quand on se retrouvera tous les deux, est-ce que tu crois qu'on sera heureux, quand on sera vieux ? CDOmment tu crois qu'on sera ?

Normalement

Fais bien attention à ton corps et à ta santé Christine. Ne crois personne, jamais, même si on te dit "je n'ai jamais... j'ai toujours..." Et puis j'espère que tu sais que les maladies sont transmissibles non seulement lors de l'éjaculation mais par la simple pénétration. Pardon d'être aussi cru, mais je voulais te dire ça depuis longtemps. Bon, je vais essayer de me rendormir un peu. Je voulais te dire aussi: je ne peux plus te lire. Je n'en peux plus du sujet Angot. C'est devenu une souffrance.

Sujet Angot

Cette fois, j'espère qu'on ne va pas me faire changer les noms, je ne dis rien de mal, je ne dis que la vérité, ce que je sais, ce qui est vrai. Et tellement sur tellement de gens, qui pourraient m'accuser, me porter au tribunal, à moins d'un regroupement, improbable, à moins d'une communauté, lâchons le mot, inavouable. Pas dans le sens de référence, mais le sens: vous ne devriez pas l'avouer que vous êtes une communauté de lâches.

Quitter la ville

Un homme, dans la dernière phase d'une maladie mortelle, est prostré sur un lit d'hôpital. Il ne doit cesser de penser, sous peine de mourir: "Un vide dans ma tête aurait l'effet d'une embolie". Le père, la mère, des vieux dont il s'occupait, le personnel soignant se succèdent à son chevet; les bruits du monde lui parviennent par la télévision, les bribes de conversation dans le couloir. Lui ne pense qu'à Muriel, sa femme. Un monde se reconstruit. Souvenirs, peurs, obsessions, délires remontent en désordre, là, devant nous, sur la page, sur l'écran d'une conscience bouleversée, portée à son point d'incandescence. L'homme parvenu à cet état limite est le maître d'un étrange ballet où les danseurs qu'il convoque sortent des coulisses de la mémoire, changent de partenaires et dansent avec les ombres. C'est l'instant où la vie et la mort se font face, se défient et s'enlacent, c'est l'instant où s'accouplent l'obscène et le sublime.

Not to be